Les particules fines dans l’atmosphère

Publié le 1er juin 1997

Rapport

L’avis du Comité de la prévention et de la précaution a été sollicité sur :

  • l’état des connaissances en matière d’effets sur la santé des particules fines,
  • les indices de pollution particulaire (PM10, PM2.5…) à surveiller,
  • la stratégie d’implantation des sites de mesure permettant de mieux prendre en compte les effets sur la santé établis ou suspectés,
  • l’évolution réglementaire préconisée.

La qualité de l’air urbain et son impact sur la santé humaine sont devenus ces dernières années un sujet de préoccupation pour les français. La loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie du 30 décembre 1996 prend en compte cette préoccupation et la place au cœur du dispositif de réduction de la pollution atmosphérique.

Cependant, les particules en suspension, notamment celles émises par les moteurs diesel, compte tenu de leur impact sur la santé, posent un problème spécifique. La composition des particules dans l’air urbain varie considérablement selon les conditions géographiques, physiques ou anthropiques. La nature des particules varie selon leur taille, les particules les plus grosses (diamètre supérieur à 2,5 µm) étant principalement d’origine minérale ou biologique, tandis que les particules « fines » (diamètre inférieur à 2,5 µm) proviennent de la condensation de vapeurs peu volatiles (à la suite de combustion par exemple) et de la coagulation de particules d’origines diverses (sulfates, nitrates, composés organiques). Les émissions des véhicules à moteur se situent dans la gamme des particules fines.

La part des transports parmi les sources d’émission atmosphérique des particules a crû en France, en termes relatifs, d’environ 5 à 40 % entre 1960 et 1995. Depuis 3 à 5 ans, les immissions des particules dans de nombreuses agglomérations ont tendance à stagner, après une réduction forte pendant les décennies antérieures. En France, parmi les émissions particulaires attribuables aux transports en site urbain, une fraction particulièrement importante est imputable aux véhicules à moteur diesel, du fait du taux élevé de ce type de motorisation. De plus, à faible vitesse et au ralenti le moteur diesel produit environ 20 à 90 fois plus de particules que le moteur à essence et 60 à 370 fois plus que le moteur au gaz naturel. Des efforts sont accomplis. Mais le parc automobile, dont le volume croît continuellement, est caractérisé par un entretien insuffisant et un faible renouvellement, notamment des véhicules diesel.

Or ce sont les particules les plus fines, dont la part issue des transports est importante mais mal définie, qui atteignent en plus grand nombre les alvéoles des poumons (près de la moitié), les particules de plus grande taille étant précipitées sur la muqueuse des voies aériennes puis dégluties.

Les résultats des principales études épidémiologiques convergent pour attribuer aux particules fines une part de responsabilité dans la survenue d’une vaste gamme d’effets sanitaires. À court terme, on observe l’aggravation des signes cliniques préexistants chez certains sujets asthmatiques, enfants et adultes, et l’augmentation de la fréquence des décès prématurés par affection respiratoire ou cardio-vasculaire chez des adultes souvent âgés ; ces manifestations ont été principalement attribuées à l’augmentation de la concentration des particules en suspension. À long terme, on observe une surmortalité modérée par affections cardio-vasculaires ou cancer du poumon dans les villes les plus polluées.

Les études épidémiologiques ainsi que les études expérimentales d’immunotoxicité et de génotoxicité permettent de conclure, avec un raisonnable degré de certitude scientifique, que les particules fines, notamment celles émises par les véhicules diesel, sont bien des facteurs de risque sanitaire. Le Comité de la prévention et de la précaution estime en conséquence que les données scientifiques disponibles permettent de considérer les particules fines (mesurées en tant que PM2.5) comme un des indicateurs les plus représentatifs de la qualité de l’air d’un point de vue sanitaire. De nombreuses incertitudes subsistent cependant, qui appellent la poursuite de recherches expérimentales et épidémiologiques, notamment sur les effets à long terme de ces substances (apparition de cancers autres que broncho-pulmonaires ou développement de l’asthme).

En dépit de cette situation, il n’existe pas en France d’étude systématique récente sur la composition des particules dans l’air urbain des principales villes, en fonction de leur situation géographique ou des conditions météorologiques ou encore d’activité anthropique. On ne dispose pas non plus de mesure systématique des particules fines dans les réseaux déjà installés. Actuellement, on mesure essentiellement les fumées noires.

La France présente ainsi la particularité d’être le pays qui dispose du plus fort taux de motorisation diesel, et qui, en même temps, accuse un retard certain en matière d’équipements de réseaux de mesure des particules, notamment des particules fines, émises par des véhicules dans l’air urbain.

Recommandations

Le principe de précaution engage notre pays dans une attitude qui doit sans attendre être exemplaire en matière de réduction des émissions, de surveillance des immissions, de caractérisation des expositions, d’études et de recherches concernant les particules fines dans l’air urbain. Ce constat conduit le Comité de la prévention et de la précaution à émettre les recommandations suivantes :

  1. Engagement d’efforts soutenus pour la réduction des principales sources d’émission des particules fines notamment les émissions issues de la motorisation de type diesel en milieu urbain.
  2. Standardisation des critères de choix des sites d’implantation des capteurs et des méthodes d’échantillonnage et de mesurage des particules en suspension, notamment en vue de la caractérisation des immissions urbaines de fond et des immissions de proximité.
  3. Équipement systématique des agglomérations de plus de 250 000 habitants (puis, à partir de 1999, plus de 100 000 habitants) de systèmes de mesure de PM2.5 en complément des mesures de PM10 prévues par la loi. Des mesures parallèles des fumées noires maintenus pendant plusieurs années permettront d’assurer la continuité des séries historiques d’évaluation de la qualité de l’air.
  4. Réalisation d’études sur les expositions des populations dans certains espaces particuliers (tunnels, parkings souterrains, voisinage de grandes voiries interurbaines, de stations service…).
  5. Engagement d’études sur l’exposition individuelle au sein d’échantillons représentatifs de la population générale dans divers sites.
  6. Analyse périodique dans certaines agglomérations (et notamment dans celles où est prévue l’installation d’un réseau de surveillance épidémiologique) du nombre et de la composition minéralogique et chimique des particules fines.
  7. Contribution de la France à la définition de standards européens de mesure de particules dans l’air urbain, dans un souci d’assurer une homogénéité des conditions de la mesure et de l’échantillonnage à l’échelle de l’Europe notamment en matière de PM2.5.
  8. Soutien de l’effort de recherche dans la compréhension des relations sources-immissions, et dans les domaines de l’épidémiologie, de la génotoxicité et de l’immunotoxicité, notamment sur les effets à long terme de l’exposition aux particules fines.

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